Fernando de Amorim
Biarritz, le 22 août 2025
Les psys en général, les analystes en particulier, font semblant de ne pas être concernés par la castration, ce qui revient à considérer que commenter un document, c’est comme faire une analyse, ainsi que l’a écrit Lacan. Faire une analyse, c’est faire semblant de faire une psychanalyse. Analyser n’est pas construire et ce qui caractérise une psychanalyse, c’est son résultat, à savoir la construction par le sujet de sa responsabilité de conduire aussi sa destinée.
La psychanalyse produit un effet a posteriori, comme n’importe quel traitement. Même si la psychothérapie avec psychanalyste, première étape d’une possible psychanalyse, peut produire un effet immédiat.
Édith de Amorim m’a raconté que, dans la file d’attente d’un supermarché, une cliente – probablement une habituée – s’est plainte à la caissière : au réveil, elle avait des plaques rouges sur tout le visage, qui disparaissaient dans l’après-midi, et elle était allée voir plusieurs médecins, sans succès. Édith est entrée dans la conversation en s’excusant d’avoir entendu et s’est présentée en tant que psychanalyste, argumentant qu’il serait intéressant de parler avec une personne formée à écouter sur ce qui se passe dans son corps. La dame a bien reçu l’invitation et a été appuyée dans sa décision par la caissière. Le rendez-vous est pris à l’instant même. À la sortie de la première séance, la dame a dit avoir moins de plaques et souffrir moins de ses démangeaisons. Elle a confié qu’elle allait devoir prendre une décision dans un mois et que cette décision changerait sa vie. Quant à son impression d’une amélioration, j’estime qu’il s’agit de l’amour de transfert, tout comme sa réponse à l’offre faite par la clinicienne. Cette amélioration pourra être utilisée pour justifier une opération clinique sérieuse, à savoir technique de l’écarteur (augmentation du nombre des séances) et surtout entrée en psychanalyse.
L’entrée en psychanalyse engage tellement l’être que certains, les délicats, face à la tâche qui les attend, se dérobent, en fuyant, en mourant. À l’inverse, une psychanalysante a reconnu qu’elle avait, selon ses mots, « progressé dans [sa] vie sans [s]’en apercevoir ». Sans influence, sans magnétisme, sans suggestion, elle est arrivée seule à constater à quoi ont servi ses efforts de temps, d’argent, de déplacement et d’associations libres.
Le Moi n’aime pas l’être ; il n’aime pas non plus la créativité, le désir. De là la résistance du Moi du parent envers l’enfant, de l’enseignant envers l’élève, de l’analyste envers le psychanalysant.
Pour supporter la vie, au sens biologique, l’être a pour option – option mise en place par la psychanalyse – de construire sa responsabilité de conduire aussi sa destinée. Cette construction lui donnera le statut de sujet, ce qui lui offrira des moyens de danser, non avec la vie mais avec le Réel car, sur ce Réel en lui – la vie biologique – l’être n’a aucun contrôle, même si le Moi fait semblant d’en avoir. J’interprète les souffrances psychiques et corporelles comme des signalements à l’Autre barré et les maladies organiques comme des appels à n’importe qui. Il s’agit donc de signalements et d’appels de l’être pour que le Moi se décide à se dégonfler, voie unique pour que l’être puisse devenir sujet et mette en place, à partir de l’objet rien, sa construction, la vraie.
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