Fernando de Amorim
Biarritz, le 12 août 2025
J’invite le lecteur à entendre « clinicien » ici comme celui qui occupe la position de psychothérapeute ou de supposé-psychanalyste.
La position de psychothérapeute peut être occupée par le marabout, le médecin, le psychiatre, le psychologue, ou par le psychanalyste lorsqu’il cède de sa position de psychanalyste pour occuper celle désignée, consignée par le Moi de l’être dans la position de malade (alité) ou de patient (en consultation externe en institution ou sur le fauteuil).
Le lecteur aura remarqué que la position de l’être dans la topologie clinique – lit, fauteuil en consultation externe, fauteuil en consultation à l’extérieur, divan – compte pour déterminer la position psychique dans laquelle se trouve le Moi. Cette position de l’être indique la position du clinicien.
Modestement, mais surtout fondé sur l’ignorance, j’avais osé m’appuyer sur l’indétermination de Werner Heisenberg.
Si un Heisenberg évoque l’indétermination – une autre traduction est imprécision – s’agissant de l’objet de la science physique, pour quelle raison exiger de la psychanalyse, pour qu’elle puisse être considérée comme science, qu’elle ait comme modèle l’objet physique ?
Le principe d’indétermination est parfois appelé principe d’incertitude. L’emploi de ces deux termes pour désigner la même notion résulte d’un problème de traduction vers l’anglais de l’article de Heisenberg. En effet, lors de la première rédaction de son article, Heisenberg emploie les termes Unsicherheit (incertitude) et Ungenauigkeit (imprécision). Puis, comprenant qu’ils peuvent prêter à confusion, il décide d’utiliser finalement le seul terme Unbestimmtheit (indétermination).
Le psychanalyste installé, sûr de sa place, empêche la psychanalyse de devenir science, clinique, référence pour les sciences qui s’y rapportent. La nouvelle génération désireuse de devenir psychanalyste ne doit pas se contenter de repenser la psychanalyse. Il faut repenser la position de l’analyste. La psychanalyse peut-elle se contenter d’un analyste, c’est-à-dire d’une personne qui abandonne sa psychanalyse personnelle tout en sollicitant du psychanalysant qu’il continue la sienne ?
Les jeunes doivent avoir à l’esprit que quelques années de psychanalyse ne sont pas suffisantes pour être habilité à occuper la position de psychanalyste. De là ma proposition de suivre l’indication freudienne de continuer sa psychanalyse le temps de son exercice clinique, ce que je résume par la formule : la psychanalyse du psychanalyste est sans fin. Au contraire de démoraliser le jeune clinicien – personne ne peut affaiblir un désir, personne – mon intention est de signaler que certains ont pris la mauvaise voie en suivant celle du Moi de l’analyste. Ce dernier a abandonné son être pour suivre le chant des sirènes de son Moi. L’abandon de sa psychanalyse personnelle en est la preuve. Le Moi aliéné suit la tranquillité du courant circulaire. Le Moi est à la dérive et il amène dans son aliénation le désir de savoir du psychanalysant. Pour ce qui est du clinicien, l’opération est déjà accomplie. Que ce dernier retourne sur le divan, unique voie possible pour devenir psychanalyste, pour de vrai.
Repenser la position du clinicien (I)
Repenser la position du clinicien (II)
Repenser la position du clinicien (III)
Repenser la position du clinicien (IV)
Repenser la position du clinicien (V)
Repenser la position du clinicien (VI)
Repenser la position du clinicien (VII)
Repenser la position du clinicien (VIII)
Repenser la position du clinicien (IX)
Repenser la position du clinicien (X)
Repenser la position du clinicien (XI)
Repenser la position du clinicien (XII)
Repenser la position du clinicien (XIII)
Repenser la position du clinicien (XIV)
Repenser la position du clinicien (XV)
Repenser la position du clinicien (XVI)
Repenser la position du clinicien (XVII)
Repenser la position du clinicien (XVIII)
Repenser la position du clinicien (XIX)
Repenser la position du clinicien (XX)
Repenser la position du clinicien (XXI)
Repenser la position du clinicien (XXII)
Repenser la position du clinicien (XXIII)