Les Maux du médecin
Fernando de Amorim
Paris, le 22 septembre 2020
Pour Madame R.
Le burn-out se traite chez le psychanalyste et non avec des pilules ou des arrêts-maladies.
Un Monsieur n’a pas envie d’aller travailler. Il se dit mieux chez lui. Donc ? il ne va pas enseigner et sa classe reste sans enseignant.
Comme il a décidé de ne pas aller travailler mais qu’il n’avait pas d’arrêt-maladie de son médecin traitant, il n’a pas été payé pour sa journée. Qu’à cela ne tienne ! Il est allé voir sur internet une maladie de laboratoire, le burn-out, et avec son propre diagnostic, il arrive chez le médecin qui ne l’examine pas, mais le déclare apte à ne pas travailler pendant deux mois.
Ce médecin répond à la demande du Moi. En faisant cela, il ne rend service à personne : ni au corps enseignant qui doit assurer le remplacement de ce Monsieur, ni aux enfants, ses élèves, et ni non plus à Monsieur.
L’effilochement de la dignité, de l’éthique, du respect des règles du savoir-vivre actualise les dires d’Hésiode dans « Les travaux et les jours » : « Nul prix ne s’attachera plus au serment tenu, au juste, au bien : c’est l’artisan de crimes, à l’homme tout démesure qu’iront leurs respects ; le seul droit sera la force, la conscience n’existera plus. Le lâche attaquera le brave avec des mots tortueux, qu’il appuiera d’un faux serment. ». La tapeuse se reconnaîtra.
Ce médecin distribue des arrêts-maladie sans justification clinique. Mais le Monsieur avait besoin, pour justifier son absence, du « mot du médecin ».
Le mot du médecin ici c’est l’« arrêt de travail », que j’ai entendu d’une autre manière. Le « maux du médecin » signifie ici, selon l’auteur de ses lignes, un malaise lié à une formation universitaire médicale qui ne prend pas en compte l’appareil psychique freudien, à savoir, les triches du Moi, la volonté de se la couler douce de l’Autre non barré, et un Surmoi qui n’a plus d’autorité pour rappeler au Moi-coquin que s’il est arrêté qui portera son travail ?
Être payé sans travailler c’est la manière, avec la complicité du médecin incompétent, qu’un nombre non négligeable de personnes en France, en souffrance psychique, a trouvé de vivre.
Cette démarche augmente de plus en plus en notre pays, mettant à mal l’économie sociale, la médecine publique, l’école de la République, la formation intellectuelle de notre jeunesse.
Le psychiste – au sein du RPH nous avons deux positions transférentielles : celle de psychothérapeute et celle de supposé-psychanalyste –, au front de la clinique, me dit : « Ce médecin ne m’aide pas ! ». Les médecins n’aident pas les psychistes quand ils arrêtent ces personnes sans raison médico-chirurgical.
Ce médecin a certifié une fausse maladie médicale mais une vraie souffrance psychique qu’il traite sans compétence, c’est-à-dire, avec un arrêt-maladie.
La lâcheté clinique de ce médecin à attester d’une maladie qui n’existe pas par des certificats justifiés par son diplôme universitaire et non par des faits cliniques, aidera un magnifique projet social, la sécurité sociale, à couler, corps et biens.
La souffrance, quand elle n’est pas attestée médico-chirurgicalement, doit être transmise au psychanalyste. Il sera apte à lire, avec le patient, les raisons du refus du Moi de ce dernier d’aller au travail, tout en voulant sa pitance à la fin du mois.