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L'art de manier la confirmation de l'interprétation en psychanalyse, Paris 9ème

La confirmation de l’interprétation
 
Fernando de Amorim
Paris, le 13 juillet 2020
 
Pour Mme R.
 
 
La clinique avec le psychotique exige du clinicien une délicate attention envers le transfert : que ce soit dans son maniement ou dans l’acte opératoire proprement dit.
 
Quand l’être, dans la position de malade (en institution), de patient (sur le fauteuil) ou psychanalysant (sur le divan) associe librement, le clinicien le laisse faire sans l’interrompre, sauf quand la construction du discours tend à prendre la voie du passage à l’acte. Dénouer la certitude que l’autre le persécute ou que l’autre est méchant et que, pour cette raison, il mérite la mort, exige une intervention bienveillante mais ferme du clinicien.
 
Ici, nous touchons le champ de l’interprétation : le clinicien valide les interprétations de castration, mais castre, toujours gentiment mais fermement, celles qui visent la jouissance de la pulsion de destruction.
 
Concernant le clinicien lui-même, il n’interprète pas. Interprétez une structure psychotique c’est névroser le Moi. Une telle stratégie de la part du clinicien peut s’avérer catastrophique car elle ouvre les vannes pour que la résistance du Surmoi agisse en lieu et place du Surmoi sans la référence symbolique (Ⱥ) qui vient avec. En un mot, le clinicien n’interprète pas le psychotique, il sollicite que ce dernier associe librement. Quand le psychotique interprète, et que cette interprétation va dans le sens de la castration du Moi, elle est appuyée par le clinicien, au nom de l’autorité du transfert.
 
Le risque pour le clinicien, quand il interprète un psychotique, est de devenir l’incarnation des organisations intramoïques, à savoir, la résistance du Surmoi (les petits points) et l’Autre non barré (A) dans le schéma ci-dessous.
 
L’enfer que vit le Moi est tel, qu’il est capable de tuer l’incarnation des organisations intramoïques pour avoir un peu de paix. C’est ce qui se passa à la fin des années 70 avec un analyste kleinien : l’analysant disait avoir rencontré une femme qui l’avait regardé de travers. Interprétation de l’analyste : « Cette femme c’est moi ! ». « J’ai rêvé qu’un crocodile me dévorait. » Interprétation de l’analyste : « Ce crocodile c’est moi ! ». « Un oiseau chantait quand j’allais dormir… » Interprétation de l’analyste : « Cet oiseau c’est moi ! ». Un jour l’analysant arrive en séance avec un révolver et interprète que tous ses malheurs sont dus à l’analyste, donc, s’il tue l’analyste ses problèmes disparaîtront. Encore aujourd’hui, beaucoup d’analystes, comme des psys en général, se sentent paralysés car ils ne savent pas opérer avec l’être de structure psychotique. Ils sont dans cette difficulté, me semble-t-il, pour ne pas être lacaniens car la clinique de Lacan apporte de l’oxygène à l’exercice quotidien du clinicien. À condition de savoir en faire usage.
 
L’analyste en question, qui était innocent mais pas con, demande à l’analysant d’attendre un instant, le temps pour lui d’appeler son épouse pour dire qu’il ne rentrerait pas dîner ce soir. L’analysant acquiesce et l’analyste court vers la rue où il attend la police. En rentrant dans son cabinet, avec les policiers, il retrouve l’analysant tranquillement assis.
L’entrée dans la voie de la structure psychotique ne se fait pas immédiatement. Les urgences psychiatriques posent des diagnostics sûrs puisque les signes cliniques sont évidents.
 
Chez le psychanalyste, le diagnostic n’est pas évident parce qu’il faut un alignement pour que la structure soit mise à flot.
 
Le Moi (a) doit être en état d’agitation, il doit viser un autre (a’) ; si cet autre n’est pas du même sexe que lui (le Moi), le clinicien n’a pas encore les éléments pour conclure qu’il a affaire à la psychose.
 
C’est lorsque le Moi s’agite en visant un autre du même sexe et qu’il est sûr – usage technique de la certitude et que le résultat est positif – d’être persécuté, que le clinicien peut mettre en place l’absence d’interprétation propre à la conduite de la cure chez le psychotique.
 
Pendant cette période clinique, qui commence dès la rencontre avec le patient et jusqu’à la positivité de la technique de la certitude, le clinicien doit empêcher qu’il soit utilisé par le Moi de l’être comme méchant ou objet de persécution. Il en va de sa sécurité.
 
Quand il a son diagnostic structurel, le clinicien est plus à l’aise pour opérer avec l’être de structure psychotique.
 
Quand le Moi s’apaise, il est possible d’envisager la construction des Durcharbeitung : le désir de savoir, de travailler, d’aimer, d’écrire.
 
Proposer à l’être la technique d’association libre tout en supportant le transfert, sont des voies possibles pour la conduite de la cure chez le psychotique, cure dont il est possible de pronostiquer qu’elle avancera par à-coups, et cela jusqu’à la possibilité d’une île ou la construction d’un tombolo (Cf. Carte des trois structures). Demander au patient ou au psychanalysant de structure psychotique d’interpréter sa propre association libre, constitue également une proposition car, si le praticien pousse le Moi dans une situation où il se sent humilié, à ce moment-là l’autre, qui l’humilie, devient l’incarnation du grand Autre non barré.
 
Voici un exemple clinique issu de la clinique de Madame R. :
 
Lors d’une séance, un psychanalysant, dont l’hypothèse diagnostique est la psychose, dit à propos de sa mère :
 
- « Elle avait des relations sexuelles avec mon père et c’est normal que ce soit avec lui et non avec moi. ».
 
La clinicienne dit :
- « Oui ! »
 
Le oui, ici, a une valeur de confirmation de l’interprétation du psychanalysant et ne constitue pas une interprétation de la clinicienne.

(voir photo)
 
Dans ma modification du schéma freudien, je pense que lorsque la libido du Ça, libido qui nourrit normalement le Moi et le Surmoi, se trouve dans l’impossibilité de se transformer en désir – le désir c’est la libido traversée par la castration produite par l’Autre barré, le registre où naît l’interprétation –, le Moi n’est plus nourri de libido, le Surmoi est nourri au compte-goutte (flèche bleu), et c’est maintenant les organisations intramoïques qui sont nourries directement à la source (flèche en vert).
 
Dans le cas de souffrance psychique (névrose, psychose, perversion), le Surmoi n’exerce plus sa fonction d’autorité bienveillante qui attire l’attention du Moi à ne pas faire une bêtise, s’il s’agit d’un mineur, ou une connerie, s’il s’agit d’un majeur.
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