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Le Moi et le Réel


Le Moi et le Réel
 

Fernando de Amorim 
Paris, le 10 juillet 2021 
 
Le temps de réaction du Moi face au Réel dépend de son aliénation, de sa rigidité et de sa structure. 
 
L’aliénation du Moi concerne les trois structures : névrose, psychose, perversion. Elle se caractérise par l’égarement du Moi ou sa difficulté à réagir de manière appropriée à des situations inaccoutumées. La rigidité de cette instance psychique concerne sa réponse unique à une situation nouvelle. Quant à la structure, le Moi aura la tendance à répondre avec son modèle déjà préétabli ou d’une manière qui aura déjà donné des résultats favorables c’est-à-dire qui l’aura sorti de l’embarras. 
 
Le comportement de con, comme on dit en langage peu soutenu, en visant les réticents à la vaccination, n’entre pas en ligne de compte ici car, s’il est possible d’examiner cliniquement, le comportement du con est propre à un Moi névrosé, psychotique ou pervers. En revanche, même les cons ont le droit d’être traités en citoyens. Pour cette raison, je propose au gouvernement de donner un délai à ceux qui ne veulent pas se faire vacciner. S’ils ne se vaccinent pas, le vaccin deviendra payant pour eux et tous les frais de traitements concernant de près ou de loin la Covid-19 seront à leur charge. Une chose est d’être aliéné, s’en est une autre que d’être irresponsable. 
 
Après cette brève introduction, j’en viens au cœur de mon affaire. 
 
Le coronavirus se propage de manière galopante. La vaccination est la seule manière d’arrêter sa propagation. Cette propagation risque d’augmenter les hospitalisations, de nous confiner, ce que serait une catastrophe pour notre vie mentale, sociale, économique. Pour quelle raison le Moi résiste-t-il à se faire vacciner ? 
 
Le lecteur a compris, je ne vise pas ici les êtres humains mais leurs Moi. 
 
Pour examiner la raison de cette réticence du Moi, il faut d’abord mettre en évidence ce qui se sait du temps d’incubation, du déclenchement de la maladie dans un organisme, de la contagion (lorsqu’elle échappe au contrôle humain), la capacité de transmission, de la contamination (lorsqu’il est possible d’éviter la transmission) du virus. Pour faire vite : le Moi a toujours plusieurs temps de retard dans sa réaction au Réel, ici, la vie – attaque virale, défense immunologique – organique. 
 
Il faut comprendre ici organisme comme étant l’organisme humain plus l’appareil psychique freudo-lacanien. 
 
Chaque personne infectée par le virus va contaminer au moins trois personnes en l’absence de mesures de protection. 
 
Quand l’organisme est contaminé par le virus, la phase contagieuse au Covid-19 est de huit jours en moyenne. Cela signifie que pendant huit jours, le Moi ignore ce qui se passe dans l’organisme qui l’abrite. Et lorsqu’apparaissent les symptômes, le Moi ne reconnaît pas forcément ce qui se passe dans l’organisme qui l’abrite. 
 
Pendant l’incubation, période entre la contamination par le virus et l’apparition des premiers symptômes (quatre à quatorze jours), le Moi est toujours ignorant de ce qui se passe dans l’organisme qui l’abrite, même si cet organisme est déjà contagieux pour d’autres organismes humains, ses semblables. 
 
Donc, un organisme humain est contagieux avant que le Moi puisse savoir qu’il l’est. Cette répétition de ma part vise à mettre en évidence que l’organisme humain a sa propre forme de protection, l’organisme est vivant (près de la moitié des organismes positifs à la Covid n’ont pas de symptômes, même s’ils sont contagieux, car ils développent des anticorps qui combattent l’infection), ce n’est pas une plaque de métal qui subit des assauts viraux et se récupère dans une forme de résilience, expression fourre-tout propre aux psys de garde qui confondent le champ du biologique et celui du physique, qui ont négligé l’enseignement de la psychanalyse mais qui ne se gênent pas pour se présenter médiatiquement en tant que psychanalyste quand c’est bon pour les affaires ou pour leur narcissisme. 
 
Ce n’est pas parce que le Moi en tant que personne n’a pas des symptômes ou, s’il en a, n’en tient pas compte – dans le premier moment il est ignorant, dans le deuxième il est aliéné –, que l’organisme n’est pas contagieux envers un autre organisme. 
 
Je vise à montrer ici le retard entre ce qui se passe dans l’organisme vivant et la reconnaissance par le Moi de ce qui se passe dans sa demeure, pour rappeler la formule – plus que jamais d’actualité – de Freud, à savoir, que le Moi n’est pas maître chez lui. 
 
Penser la médecine des êtres parlants sans la psychanalyse, deviendra une tâche des plus ardue pour les spécialistes de l’organisme humain et de la santé publique. 
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