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De la différence entre un adulte et un majeur


Fernando de Amorim
Paris, le 7 juillet 2023

 Dans Marianne du 6 juillet 2023, Amar Dib écrit, à propos des émeutes qui ont secoué la France, que « les pères des quartiers difficiles sont des adultes défaillants ».

 Je m’autorise ici quelques réflexions.

 Un père est toujours défaillant. Ce qui représente ou porte le symbolique est pris inévitablement dans ce registre du défaillant. La formule de monsieur Dib est malheureuse car il y a aussi des défaillances dans l’éducation proposée au sein des quartiers favorisés.

 Il ne s’agit donc pas du père mais de ce qui est nommé tel.


 Pour ce qu’il se passe en banlieue, la fonction du père, de la Loi, ferme mais bienveillante, se retrouve dans la police qui arrête, chez l’enseignant qui met au travail, chez le mouvement « gilets roses ». Les hommes qualifiés par monsieur Dib de « pères défaillants » sont en fait des géniteurs : ils savent utiliser leur pénis pour éjaculer et faire que des femmes mettent au monde des enfants, ils veulent même avoir plusieurs enfants, « comme le prophète » m’avait dit l’un d’eux, ils sont capables de se courber devant ledit prophète mais incapables de lever leur cul de leur chaise pour tenir tête à leur enfant, enfant qui ne demande que ça – à savoir qu’un adulte se pointe devant lui pour l’empêcher de ne pas aller à l’école, de fumer de la merde, le shit, comme ils disent. Quelle drôle d’idée, fumer de la merde… Ceci donne à voir l’image qu’ils ont d’eux-mêmes.

 Quand le géniteur délaisse sa femme, que seule cette dernière porte la charge de laver, vêtir, travailler et éduquer les enfants, pendant que le mec est à la mosquée, qui peut prendre soin de veiller à ce sac de pulsions déchaînées qu’est un enfant de n’importe quel quartier ?

 Je me concentre sur la chose musulmane mais elle concerne n’importe quel majeur qui délaisse le corps de sa femme pour aller jouir de son idéologie (qu’elle soit religieuse, sportive ou politique). Je pense à ce mec catholique, politicien, qui a laissé sa femme et est parti avec une jeune femme et qui ne comprend pas pour quelle raison son fils se scarifie…

 Il ne s’agit pas de banlieue, de religion, mais d’une manière de penser du mec. Les uns qui mettent leurs fesses en l’air pour adorer leur maître, les autres qui s’agenouillent pour adorer leur sauveur, d’autres encore qui veulent développer leur féminité pour comprendre leur fille… Ce ne sont pas des êtres dans la position de père, ce sont des Moi paumés.

 Dans cette armada de paumés, pas un pour rattraper l’autre.

 La religion est une affaire intime entre l’être et son Dieu. Ce qui se passe avec la banlieue c’est qu’elle est un appendice des pays d’idéologie musulmane et que les politiciens laissent faire parce qu’ils sont là pour quelques mandats. Les gens qui travaillent tous les jours vivent pendant des années avec les abrutis, les méchants, les enragés qui savent qu’ils sont passés à côté des opportunités de la République et que ce sera très difficile de redresser la barre. Ils utilisent leurs bébés – ayant l’âge de 10, 15, 18, 32 ans – comme arme de vengeance de leur désespoir existentiel.


 Ces jeunes indiquent aux adultes qu’il faut repenser le pays tout entier. Il faut mettre un terme à cette idéologie du bien pour tous. Il faut aider ces jeunes en leur indiquant, clairement, les règles du jeu social. La première chose est d’aimer le lieu où, vous, jeunes, vous habitez. Si vous n’êtes pas contents, que pouvons-nous faire, nous les adultes, pour vous aider ? Quand j’avais proposé la création de la CPP – Consultation Publique de Psychanalyse, c’était pour les jeunes, pas pour les vieux ; quand j’avais proposé que les universités m’adressent les étudiants dès la première année de psychiatrie ou de psychologie pour ainsi les former à la clinique psychanalytique, c’était pour former une génération d’adultes responsables. La banlieue est une pépinière de libido, de pulsions et de désirs. Il faut transformer ce sac de pulsion en corps désireux, désireux de saisir ce que les français avant nous ont proposé comme politique sociale – à savoir, le service de santé, l’éducation, une solidarité qui sert au compatriote en difficulté et non au Moi arnaqueur. Pour cela il faut décider les gens à être ou non français. Quelle drôle d’idée que celle de la double nationalité, cette forme d’engager l’être qu’à moitié dans la terre qu’il habite. Le modèle français est excellent, le modèle anglo-saxon est tribal. Il faut que le français soit français et non noir, arabe, roumain…

 La première forme de discrimination est de ne pas reconnaître qu’un porteur de pièce d’identité française est un Français, est d’accepter que ce porteur se présente comme algérien quand il est né à Bobigny.

 L’intégration c’est comme la respiration, c’est tous les jours, c’est à chaque instant, sans même qu’on y pense. Sinon tu meurs.

 Ces enfants ne sont pas issus de « l’union d’un père et d’une mère », comme l’écrit monsieur Dib, mais d’un homme et d’une femme, même si la médecine humaine devient tellement idéologique qu’elle cède à la pression sociétale pour donner un enfant à celles qui le veulent, à n’importe quel prix. L’union d’un père et d’une mère forge un enfant, un pubère, un homme ou une femme bien. Nous sommes loin du compte.

 Aucune différence entre les quartiers populaires et ceux de la bourgeoisie parisienne. Les deux sont portés par l’aliénation d’avoir un enfant, que monsieur Dib écrit, avec un savoir inconscient sans doute, de « bébé » : « bébés-éprouvette », écrit-il. Le surnom « bébé » était donné à Nicolas Ferry, nain qui, au milieu du XVIIIe siècle, faisait partie de la cour du duc de Lorraine. Le « nain », la « pisseuse », c’est ainsi que les majeurs accueillent le nouveau-né. Ils coupent une partie du zizi du garçon, ils coupent ou cousent la zézette des filles – c’est au choix – au nom de leur dites « religions ». Quel drôle de manière d’accueillir quelqu’un à son arrivée parmi nous… Actes barbares dignes de sauvages.


 La révolte de ces jeunes est l’indicateur de la haine qui leur est offerte dès leur venue au monde, au nom de l’aliénation du père, de la mère et du dieu méchant.

 Bien évidemment je ne vise pas ici le petit monsieur ou la petite dame qui ont contribué fortement à la venue au monde de leur rejeton, je vise le Moi et les organisations intramoïques du monsieur et de la dame et aussi de l’enfant car, la visée d’une société civilisée comme la nôtre, c’est de viser à ce que l’enfant soit préparé à devenir sujet dès sa plus tendre jeunesse. La visée doit être que l’être né devienne sujet, et non un objet, voire une chose, de la jouissance de l’autre parental. Arrêtons d’accuser toujours l’autre, « la société », « notre système politico-socio-judiciaire », « la mère de l’autiste », les « immigrés », les « français ». Commençons par devenir adultes. Tout simplement.

 La mère qui élève « péniblement seule une nuée d’enfants », cette mère d’aujourd’hui en banlieue et venue d’un pays d’idéologie islamiste, est comme cette mère française catholique du XIXe siècle ; l’aliénation du mec, qui éjacule et laisse à sa bonne femme la charge de la grossesse ainsi que celle de se lever la nuit pour changer la couche du nourrisson, cette aliénation concerne l’abruti venu du bled comme le blédard parisien : des connards finis.

 Je rappelle, aux ânes sensibles : je vise toujours le Moi, jamais un être humain.

 Il n’y a pas de « cadre sécurisant et inspirant » pour les enfants. Ça n’a jamais existé et cela n’existera jamais. Les enfants sont victimes des majeurs : de leurs violences, de leur désir sexuel (la grande majorité d’enfants sont violés à la maison par des proches : père, mère, grand-frère qui, eux-mêmes, furent violés par les mêmes proches…).

 De là l’importance du discours ferme de la République. Sans la police, sans la justice, ce serait la loi du plus fort, les Algériens connaissent cela, les Iraniens, les Russes aussi. D’ailleurs leurs maîtres ne se gênent pas pour donner des leçons sur la manière française de mener la barque sociale. C’est à rire aux éclats.


 Un enfant ne doit pas traîner dans la rue le soir, un enfant c’est du lait sur le feu, jusqu’à ce qu’il comprenne que ses parents travaillent pour l’éduquer. Mais quand le père est aliéné par le jeu, par l’idéologie religieuse, par l’alcool ? De toute évidence, tout le monde n’est pas né pour exister dans sa vie.

 Les pères sont « éconduits », comme écrit monsieur Dib, parce qu’ils ne sont pas au rendez-vous de la paternité. Un père est défaillant, il n’est pas impuissant. Un père impuissant est un majeur qui sait éjaculer avec sa bite mais ne sait pas jouer le jeu symbolique du père : celui d’aimer et respecter, son épouse, son enfant. Dans cet ordre-là précisément.

 Il n’y a pas de « démission des pères » car, pour démissionner il faut d’abord avoir été au travail. 

 

 Le « vivre ensemble » évoqué par monsieur Dib fait partie de la liste d’idéologies mises en place par les idéologues qui ne vivent pas au quotidien dans les banlieues. Je ne souhaite pas vivre aux côtés d’un abruti, d’un trafiquant de drogue, d’un type qui m’impose ses règles idéologiques basées sur ses croyances. Je veux vivre dans le respect, respect de moi-même, de mon épouse, quoi de plus respectueux que de lui dire des mots doux et de me présenter, nu comme un ver avec mon ver au garde à vous ? Quoi de plus respectueux que de ne pas laisser mon fils faire n’importe quoi ? De ne pas aller voir la nudité de ma fille en invoquant une autorisation d’une entité supérieure ? De dire bonjour au voisin ? De ne pas imposer à la société tout entière ce que je pense ?

 D’accord pour faire « référence à la morale » et « aux valeurs », mais lesquelles ? Est-ce une morale du respect ou de l’injonction, si la fille ne porte pas ce que veut l’idéologie de papa ? Est-ce supportable que des homosexuels puissent vivre ensemble avec nous ? L’éducation sera celle de la République laïque ou elle sera selon l’idéologie pseudo-religieuse ou militante (dois-je rappeler qu’à la fin du XVe siècle militer c’était faire la guerre) ? Les « attentes et les besoins de nos enfants » ne concernent pas les enfants des banlieues parce qu’ils n’attendent rien ou pas grand-chose. Brûler une école, un bus, un commissariat sont autant d’actes qui appuient mon interprétation que j’espère, de tout cœur, fausse.

 Penser que « chacun peut s’épanouir » est un vœu pieux. En revanche, « inculquer », pas aux enfants d’abord, mais aux parents, comme je l’appelle de mes vœux, les « valeurs essentielles, celle de la laïcité qui fait l’objet de nombreuses attaques et qui a du mal quelquefois à faire prévaloir la tolérance qu’elle doit incarner, les éveiller à la lutte contre le racisme et les discriminations que plus personne n’ose aborder, et enfin les initier à la fraternité et à la solidarité afin qu’ils puissent évoluer dans un monde sans a priori » est souhaitable. Mais comme je l’avais indiqué au début de ma citation du texte de monsieur Dib, celui-ci vise le mineur, pas le majeur. Cette absence de courage des majeurs, à tous les niveaux, attise la révolte des jeunes.

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